l’essentiel
En ruine, un village cathare du XIIIe siècle s’apprête à renaître au pied des Pyrénées, à 1 300 mètres d’altitude. Un projet ambitieux porté par une commune ariégeoise de 29 habitants, Montaillou, rendue célèbre par un ouvrage de l’historien Emmanuel Le Roy Ladurie.
C’est un projet unique qui ne manquera pas de faire parler de lui à travers le monde, en particulier au sein des communautés d’historiens. À Montaillou, un petit village de 29 âmes niché à plus de 1 300 mètres d’altitude dans la haute vallée d’Ariège, le conseil municipal vient en effet de donner leur feu vert à un projet ambitieux porté par l’association le Castellas : la reconstruction d’un ancien village historique.
Un chantier qui prévoit de redonner vie à une dizaine de maisons en pierre, dont les vestiges trônent autour des ruines du château de Montaillou. Un véritable morceau du patrimoine cathare s’apprête ainsi à renaître, dominant à nouveau la vallée et faisant revivre un passé chargé d’histoire.
“C’est un projet très important pour notre village, qui bénéficie déjà d’une renommée mondiale, souligne Jean Clergue, le maire de Montaillou. En effet, nous voulons prolonger la démarche initiée avec la création du musée il y a trois ans, en continuité aussi avec le parcours d’interprétation.”
Un travail en concertation avec des professionnels
“L’objectif, c’est de reconstruire fidèlement l’ancien village historique en nous appuyant sur nos archives, reprend-il. Grâce au registre de l’inquisition retrouvé au Vatican et dont la traduction a été faite par Jean Duvernoy, nous avons la chance d’avoir des écrits sur les bâtisses de l’époque et leurs spécificités. Il n’est évidemment pas question de faire les choses à la légère : nous allons nous entourer de spécialistes et travailler si possible en collaboration avec des archéologues.”
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Après avoir obtenu les premiers retours de la Direction régionale des affaires culturelles et des Bâtiments de France quant à la faisabilité de ce projet incroyable, la commune se prépare désormais à mobiliser les moyens nécessaires pour sa réalisation.
“C’est l’association Le Castellas, créée il y a 40 ans, qui va entièrement porter ce projet, précise Jean Clergue. Nous allons prochainement mettre en place une cagnotte en ligne et faire appel à nos amis professionnels et industriels. Nous souhaitons également faire fonctionner les chantiers de jeunesse avec qui nous avons déjà travaillé sur Montaillou, et nous allons aussi nous rapprocher d’une école d’architecture”.
“Les maisons mesuraient en moyenne entre 5 et 6 mètres carrés”
En s’appuyant sur des archives répertoriées dans l’ouvrage de 490 pages “Montaillou village Occitan”, ce chantier prévoit de reconstruire une dizaine d’habitations.
“Nous avons identifié une dizaine de sites potentiels, précise Vincent Garcia, conseiller municipal. Cela ne signifie pas que nous pourrons tout reconstruire. Pour commencer, l’objectif est de s’attaquer à deux maisons, dont l’une est un peu plus grande que l’autre. Ce ne sont pas de grandes bâtisses. À l’époque, chaque maison se composait d’une pièce principale, d’un foyer que l’on appelait la fougagne, d’un espace appelé la solane qui faisait office de débarras, et enfin d’une chambre. Les maisons mesuraient en moyenne entre 5 et 6 m2”.
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Attestés du XIIIe siècle, le château de Montaillou et son histoire cathare attirent chaque année de nombreux visiteurs. “Nos visiteurs viennent du monde entier, de chine, des États-Unis, d’Arabie saoudite, du Canada, de toute l’Europe du Nord parce qu’ils ont lu il y a 30 ans le livre “Montaillou village Occitan”, assure Vincent Garcia. Une renommée qui promet de poursuivre son ascension.
Ce petit village qui rayonne dans le monde entier
Perché en Haute Ariège, le village de Montaillou a ouvert il y a trois ans un musée dédié à son riche passé cathare : le centre historique Jean Duvernoy. Une réalisation qui couronne vingt années d’efforts, rendue possible notamment grâce au succès planétaire de l’ouvrage d’Emmanuel Le Roy Ladurie, “Montaillou, village occitan de 1294 à 1324”.
“Le musée est né à la suite d’une campagne de fouilles archéologiques, lancée lorsque le donjon du château menaçait de s’effondrer, explique Jean Clergue, le maire de Montaillou. Nous avons fait réaliser des études et obtenu l’autorisation pour des pré-sondages. Ces premières recherches ont suscité un vif intérêt. Quatre campagnes de fouilles ont suivi, révélant un trésor archéologique, aujourd’hui présenté dans notre musée.”

DDM – S.L.
Le centre porte le nom de Jean Duvernoy, historien passionné et indépendant, spécialiste des hérésies médiévales et des Cathares. C’est lui qui a découvert et traduit les précieux registres d’inquisition conservés au Vatican, que les habitants surnomment “le petit trésor de Montaillou”. En 1965, il publie “Le registre d’Inquisition de Jacques Fournier, évêque de Pamiers (1318-1325)”, une œuvre majeure qui deviendra la matière première des travaux d’Emmanuel Le Roy Ladurie et de nombreux chercheurs.
“Tous ceux qui s’intéressent à l’histoire des Cathares finissent par s’intéresser à Montaillou », souligne le maire, non sans fierté. Et de glisser une anecdote savoureuse : « Des auteurs américains, récompensés au festival d’Angoulême, ont même créé une bande dessinée mettant en scène notre village !”