La Dépêche du Midi : De quoi est-il question dans l’accord que Donald Trump et Volodymyr Zelesnky doivent conclure ?

Carole Grimaud, spécialiste de la Russie : C’est un accord sur l’exploitation des terres rares et des minerais en Ukraine. J’avais pointé du doigt cette “Ukraine utile” lors de l’invasion russe, je trouvais qu’il y avait une sérieuse coïncidence entre les territoires occupés et l’emplacement de ces gisements… Il faut par ailleurs rappeler qu’un accord de partenariat avait été signé entre l’Union européenne (UE) et l’Ukraine en 2021. Là, l’accord américain court-circuite les volontés européennes. Il va même avoir autorité sur tout accord que l’Ukraine passera à l’avenir. C’est la dernière mauvaise blague de Trump.

Comment expliquer que l’accord soit en passe d’être conclu alors que Volodymyr Zelensky disait, il y a seulement quelques jours, que “l’Ukraine n’est pas à vendre”?

Il n’a pas le choix. Il comprend très bien que l’UE seule n’a pas les moyens de protéger l’Ukraine. Il comprend bien aussi que la présence américaine économique dans ces régions va être accompagnée de mesures de sécurité. Ça n’a pas été évoqué mais il est évident que les Américains qui vont y puiser ces ressources feront en sorte de protéger leurs intérêts et leur sécurité.

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Comment cela va se passer pour les minerais présents dans les territoires contrôlés par la Russie ?

C’est la question que je me pose : “Qu’est-ce qui a été négocié avec les Russes ?” On se souvient de l’accord oral passé entre Roosevelt et le roi d’Arabie saoudite en 1945. Il prévoyait une protection américaine contre du pétrole saoudien, mais rien n’a jamais été formellement signé. On est peut-être dans la même configuration avec ce qui a été dit à Riyad entre les États-Unis et la Russie. J’ai peur que des accords oraux soient aujourd’hui gravés dans le marbre et que nous n’en sachions rien.

Qu’est-ce qui vous fait dire ça ?

On voit que Trump se fait le porte-parole de Poutine et qu’il n’arrête pas de lui faire des cadeaux. Ma question est la suivante : “Jusqu’où Trump va-t-il donner, quelle est la contrepartie ?” Des choses ont peut-être été négociées à Riyad (où des émissaires américains et russes ont discuté le 18 février) à ce sujet. C’est une hypothèse.

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L’autre, ce serait que Poutine fait durer la “lune de miel” avec les États-Unis mais n’a aucune intention de lâcher quoi que ce soit. Pour l’instant, il se frotte les mains, la Russie revient sur la scène internationale, des tabous tombent, tout est favorable. Si c’est le cas, on peut se demander jusqu’où ira la patience de Trump. Car ça reste un businessman, expert du deal et du “je te donne ça, tu me donnes ça en échange”.

Les minerais des territoires occupés pourraient-ils être une contrepartie accordée par les Russes ?

Je ne pense pas que du côté américain, ils veuillent administrer les minerais des territoires occupés mais ils peuvent très bien s’entendre pour un accord commun sur l’exploitation des ressources en Ukraine. Ça a d’ailleurs été proposé mardi par Vladimir Poutine.

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Est-ce le début d’un accord de paix ?

Zelensky l’espère mais rien ne garantit que cet accord sur les ressources fasse avancer la paix. Le président ukrainien va dans le sens des Américains car il n’a pas le choix et qu’il espère que l’accord s’accompagne de gages de sécurité, notamment sur les troupes européennes qu’il est prévu de déployer en Ukraine. Sans cette protection, ces troupes ne viendront peut-être pas, et ça, Zelensky le sait. Mais rien n’est acté, en tout cas publiquement. On est revenu dans une diplomatie secrète où les choses se décident au-dessus des populations.

Selon Trump, l’accord viendrait “compenser l’aide américaine”… Est-ce inédit comme façon de faire ?

Disons que c’est plus clairement dit qu’après la Seconde guerre mondiale. C’est un plan Marshall à la méthode Trump, présenté d’une façon très brutale, caractéristique du personnage.